Arnaud Desjardins évoque le Soufisme

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LE SOUFISME, qu’est ce que c’est ?

 Le soufisme est le mysticisme de l’Islam. Comme tel, il a la particularité d’exister aussi bien dans l’Islam sunnite que dans l’Islam chiite. Décrire le soufisme est une tâche redoutable. Comme tout mysticisme, il est avant tout une recherche de Dieu et son expression peut prendre des formes très différentes. D’autre part, par ses aspects ésotériques, il présente des pratiques secrètes, des rites d’initiation, eux aussi variables selon les maîtres qui l’enseignent.

Bien que le soufisme se veuille rigoureusement musulman, l’Islam traditionnel, sunnite et chiite, considère le soufisme avec la plus grande méfiance.

En Iran, la grande majorité des mollahs y est vivement opposée et dans l’Islam sunnite, la plupart des Ulema sont beaucoup plus intéressés par la lettre du Coran et ses interprétations juridiques que par les spéculations des soufis auxquelles ils trouvent une odeur de soufre. Cette opposition généralisée contribue à la discrétion du soufisme.

En outre le soufisme n’a aucune unité. Chaque maître se constitue une cohorte de disciples attirés par la réputation de son enseignement. Tout au plus, ces maîtres déclarent se rattacher à une confrérie , elle même fondée par un célèbre soufi des siècles passés ; personne ne vérifie une quelconque orthodoxie de l’enseignement donné, du moment qu’il se réfère à l’Islam.

L’importance de cet Islam secret n’en est pas moins remarquable. Historiquement, il a joué un rôle de premier plan dans la naissance des déviations du chiisme que sont l’Ismaëlisme et la religion druze. En littérature, il a profondément inspiré certaines des œuvres arabo-persanes les plus remarquables comme les Contes des Mille et Une Nuits ou le poème d’amour de Leyla et Majnoun.

C’est cependant par sa spiritualité que le soufisme est le plus original. Dans la conception soufie, l’approche de Dieu s’effectue par degrés. Il faut d’abord respecter la loi du Coran, mais ce n’est qu’un préalable qui ne permet pas de comprendre la nature du monde. Les rites sont inefficaces si l’on ignore leur sens caché. Seule une initiation permet de pénétrer derrière l’apparence des choses. L’homme, par exemple, est un microcosme, c’est-à-dire un monde en réduction, où l’on trouve l’image de l’univers, le macrocosme. Il est donc naturel qu’en approfondissant la connaissance de l’homme, on arrive à une perception du monde qui est déjà une approche de Dieu.

Selon les soufis, toute existence procède de Dieu et Dieu seul est réel. Le monde créé n’est que le reflet du divin, l’univers est l’Ombre de l’Absolu . Percevoir Dieu derrière l’écran des choses implique la pureté de l’âme. Seul un effort de renoncement au monde permet de s’élancer vers Dieu:
l’homme est un miroir qui, une fois poli, réfléchit Dieu.

Le Dieu que découvrent les soufis est un Dieu d’amour et on accède à Lui par l’Amour :  qui connaît Dieu, L’aime ; qui connaît le monde y renonceSi tu veux être libre, sois captif de l’Amour.

Ce sont des accents que ne désavoueraient pas les mystiques chrétiens. Il est curieux de noter à cet égard les convergences du soufisme avec d’autres courants philosophiques ou religieux: à son origine, le soufisme a été influencé par la pensée pythagoricienne et par la religion zoroastrienne de la Perse ; l’initiation soufie, qui permet une re-naissance spirituelle, n’est pas sans rappeler le baptême chrétien et l’on pourrait même trouver quelques réminiscences bouddhistes dans la formule soufie  l’homme est non-existant devant Dieu.

Même diversité et même imagination dans les techniques spirituelles du soufisme : la recherche de Dieu par le symbolisme passe, chez certains soufis, par la musique ou la danse qui, disent-ils transcende la pensée ; c’est ce que pratiquait Djalal ed din Roumi, dit Mevlana, le fondateur des derviche tourneurs ; chez d’autres soufis, le symbolisme est un exercice intellectuel où l’on spécule, comme le font les Juifs de la Kabbale, sur la valeur chiffrée des lettres ; parfois aussi, c’est par la répétition indéfinie de l’invocation des noms de Dieu que le soufi recherche son union avec Lui.

Le soufisme apporte ainsi à l’Islam une dimension poétique et mystique qu’on chercherait en vain chez les exégètes pointilleux du texte coranique. C’est pourquoi ces derniers, irrités par ce débordement de ferveur, cherchent à marginaliser le soufisme. C’est pourquoi aussi les soufis tiennent tant à leurs pratiques en les faisant remonter au prophète lui-même: Mahomet aurait reçu, en même temps que le Coran, des révélations ésotériques qu’il n’aurait communiquées qu’à certains de ses compagnons. Ainsi les maîtres soufis rattachent-ils tous leur enseignement à une longue chaîne de prédécesseurs qui les authentifie.

Cette légitimité par la référence au prophète n’entraîne cependant pas d’uniformisation du mouvement soufi : les écoles foisonnent et chacune a son style et ses pratiques. Ces écoles sont généralement désignées en français sous le nom de confréries. Avant de procéder à l’étude de quelques unes d’entre elles, il faut toutefois garder à l’esprit que les confréries sont devenues, non pas une institution, mais au moins une manière de vivre l’Islam si généralement admise que toutes sortes de mouvements, mystiques ou non, se parent du titre de confrérie pour exercer leurs activités. Qu’on ne s’étonne donc pas de rencontrer parfois des confréries fort peu mystiques à la spiritualité rudimentaire, bien éloignée des spéculations élevées qui ont fait du soufisme l’une des composantes majeures de la spiritualité universelle.

Michel Malherbes, Les Religions de l’Humanité, pages 192-194 Ed. Critérion

 

Bonne lecture, Claude Sarfati

16 Comments on “Arnaud Desjardins évoque le Soufisme”

  1. ghislaine de carli

    Merci, Claude pour ce commentaire dont je vais tirer l’essentiel pour moi. Un peu compliqué à tout comprendre malgré tout, mais il va falloir le relire plusieurs fois.bien à vous.Ghislaine-gipsy.
    (Dieu est tout Amour)

  2. Doc

    Le soufisme est un trop vaste sujet difficilement résumable en quelques paragraphes. Malgré tout merci pour ce sujet qui fait parler de ce mouvement spirituel. Je pense personnellement que le soufisme dépasse toute idée de religion et donc d’islam. Ce n’est que dans les premières étapes qu’il s’en inspire. Plus tard on ne parle plus que de dieu, du créateur, de l’aimé, …
    www. MTO.org est un site en plusieurs langues qui peut aider à approfondir la question.

  3. alkacem

    Le grand maitre de soufisme est en TUNISIE il s’appelle BELGACEM BELKHIRI,vous avez besoin de lui.
    Merci.

  4. Mario

    Orlando Lucio dit qu’il existe un lien plus profond entre les religions Celtes, Maures (et j’inclus les religions paefennes du Moyen-Orient et du Maghreb, Arabe et non). Ce lien existait encore avant que les dieux actuels ne soient révélés sous leurs noms actuels. Ce lien existait même avant que certaines divinites ne soient regroupees pour n’en faire qu’une. Ce lien tient en une chose, un paradigme, universel : la politique est toujours fondee sur un systeme de croyance ! Je croi que l’humain est perfectible et qu’il peut s’autogerer, je suis libertaire ; mais si je crois que les echanges sont la seule chose qui relie les humains et que je veux les ameliorer alors je suis liberal ; Enfin si je ne croie pas en l’humain mais dans la loi du plus fort, alors je suis fasciste ! Tout est un systeme de croyance. Or les dieux et notre attachement en eux depend de ce systeme de croyances. La croyance appliquees soit c’est de la philosophie ou de la religion si elle comprend une notion de quelque chose d’exterieur en soi, mais tout de même en soi(les divinites, magie, forces…). Mais la croyance appliquee aux autres, par le pouvoir ou par le proselytisme, le fait de convertir autrui à ce que l’on croie, c’est de la politique. Or quelle est la croyance principale de l’humain ? Il croit en sa liberte. Et il priera les dieux soit en les implorant de lui donner les conditions necessaires à sa liberation (de la famine, du desespoir, du malheur…) soit en les accueillant en lui (ce que font les paefens, comme les Wiccas par exemple) pour qu’il accede soi-même aux conditions de sa liberation. De même certains vont voter ou croire au plus fort, mieux informer etc… et d’autres préfererons s’autogerer. Or l’humain est forcé de croire seulemnt en cette liberation, la liberte totale pour lui n’existe pas : son esprit est enferme dans son corps, qui est limite par la surface de l’eau (on ne peut pas respirer sous l’eau) et celle du ciel (on ne peut pas voler, ni vivre en plein espace). Mais l’humain vas chercher la liberte, et c’est de cette recherche de liberte que vont naitre les dieux, et c’est cette recherche de liberte qui sera le lien assez fort entre tout les humains de la planete, quelle que soit leur origine. Votre drapeau a raison d’être noir, si c’est le drapeau de la liberte, de l’autogestion et de l’anarchie.

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