Chapitre XXII. Le triple temps

Il existe un triple espace: le haut, le bas et au milieu un niveau de référence qui correspond à l’état humain.

Les trois gunas de la tradition hindoue correspondent respectivement: sattwa au Ciel, rajas à l’Homme et tamas à la Terre.

Si le plan médian est regardé comme un plan diamétral d’une sphère ( qui doit d’ailleurs être considérée comme de rayon indéfini, puisqu’elle comprend la totalité de l’espace), les deux hémisphères supérieur et inférieur sont, suivant un autre symbolisme dont nous avons déjà parlé, les deux moitiés de l’oeuf du Monde, qui, après leur séparation, réalisé par la détermination effective du plan médian, deviennent respectivement le Ciel et la Terre, entendus ici dans leur acception la plus générale; au centre du plan médian lui-même se situe Hiranyagarbha, qui apparaît ainsi dans le Cosmos comme l’ Avatâra éternel, et qui est par là même identique à l’ Homme Universel.“ (p. 180)

Il existe un triple temps, nommé dans la tradition hindoue trikâla: passé, présent et avenir (modalités temporelles). La représentation rectiligne du temps est inexacte, parce que le temps est cyclique.

(…) De même que, dans la tradition chinoise, l’Empereur, en se plaçant au point central du Ming-tang, détermine le milieu du cycle annuel; ainsi le milieu du temps est proprement, si l’on peut s’exprimer ainsi, le lien temporel de l’ homme véritable, et, pour lui, ce point est vraiment toujours le présent. (p. 182)

Le présent appartient à l’Homme, le passé au Destin (d’où son caractère de nécessité) et l’avenir à la Providence (d’où son caractère libre).

Il est que ce n’est là encore, en réalité, qu’une question de perspective, et que, pour un être qui est en dehors de la condition temporelle, il n’y a plus ni passé, ni avenir, ni par conséquent aucune différence entre eux, tout lui apparaissant en parfaite simultanéité …(p. 183

René Guénon,  »La grande triade » (extraits)

Chapitre IV. «Yin» et «Yang»

Yang: actif, positif, masculin, lumière.

Yin: passif, négatif, féminin, ombre.

Ces deux principes ne sont pas opposés, mais complémentaires. La médecine chinoise est basée sur l’idée de déséquilibre d’un de ceux deux principes.

Yang procède de la nature du Ciel, et yin procède de la nature de la Terre.

L’aspect yang correspond à ce qu’il y a de spirituel et d’essentiel et l’Esprit est identifié avec la lumière dans toutes les traditions.

L’aspect yin est identifié à la substance, à l’inintelligibilité inhérente à son indistinction ou à son état de pure potentialité.

Avec le langage aristotélicien et scolastique, yang est tout ce qui est en acte, pendant que yin est tout ce qui est en puissance.

Le Ciel est entièrement yang et la Terre est entièrement yin, ce qui revient à dire que l’Essence est acte pur et que la Substance est puissance pure.

Dans toute chose manifestée, yang ou yin ne sont jamais purs. Il y a, selon une formule maçonnique, de la lumière dans les ténèbres (du yang dans le yin) et des ténèbres dans la lumière (du yin dans le yang).

Si l’on considère spécialement le yang et le yin sous leur aspect d’éléments masculin et féminin, on pourra dire que, en raison de cette participation, tout être est «androgyne» en un certain sens et dans une certaine mesure, et qu’il l’est d’ailleurs d’autant plus complètement que ces deux éléments sont plus équilibrés en lui; le caractère masculin ou féminin d’un être individuel (il faudrait, plus rigoureusement, dire principalement masculin ou féminin) peut être donc considéré comme résultant de la prédominance de l’un ou de l’autre. (p. 41)

La Terre apparaît par sa face dorsale et le Ciel par sa face ventrale, c’est pourquoi le yin est à l’extérieur et le yang est à l’intérieur.

Autrement dit, les influences terrestre, qui sont yin, sont seules sensibles, et les influences célestes, qui sont yang, échapppent aux sens et ne peuvent être saisies que par les facultés intellectuelles.

Le yin est avant le yang dans une énumération, tout comme les trois gunas hindoues sont tamas, rajas, sattwa, donc allant de l’obscurité à la lumière.

Yang correspond au trait plein. Yin ‘ au trait brisé. Le trait plein et le trait brisé sont des éléments des trigrammes et des hexagrammes du Yi-king.

Le symbole yin-yang représente le cercle de la destinée individuelle“(p. 43).

Il est équivalent de l’Androgyne primordial. Il est aussi l’oeuf du Monde qui, après la séparation, est le Ciel et la Terre.

Il est commode (mais pas totalement vrai) de donner a Tao le nom de Grande Unité.

René Guenon, La grande triade (extraits)