Chapitre XIX. Deus, Homo, Natura

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Une triade traditionnelle occidentale, telle qu’elle existait encore au moyen âge: Deus, Homo, Natura. L’Homme est manifestement le même que dans la Grande Triade.

Dieu ne peut être envisagé comme le Principe tel qu’il en soi, car celui-ci, étant au-delà de toute distinction, ne peut entrer en corrélation avec quoi que ce soit, et la façon dont le ternaire se présente implique une certaine corrélation, et même une sorte de complémentarisme, entre Dieu et la Nature.

Dieu est dans cette triade l’objet de ce qu’on appelait théologie rationnelle. Or, ce qui est rationnel n’atteint pas le Principe même.

A cette réserve et selon ces explications, Dieu de la triade occidentale correspond au Ciel, parce que le Ciel est l’instrument du Principe.

Mûla-pakriti (hindou) ‘ la Nature primordiale et indifférenciée qui est la racine de toutes choses.

El-Fitrah (ar.)  Nature primordiale. El-tahiyah (ar.) nature manifestée.

Dans les langues occidentales on ne peut pas faire la différence entre la Nature primordiale et la nature manifestée.

[…] ce qui est «divin», étant nécessairement «intérieur» à toutes choses Regnum Dei intra vos est, agit, par rapport à l’homme, à la façon d’un principe «sulfureux», tandis que ce qui est «naturel», constituant l’«ambiance», joue par là même le rôle d’un principe «mercuriel»

[…] et l’homme, produit du «divin» et de la «nature» tout à la fois, se trouve situé ainsi, comme le Sel, à la limite commune de cet «intérieur» et de cet «extérieur», c’est-à-dire, en d’autres termes, au point où se rencontrent et s’équilibrent les influences célestes et les influences terrestres.“ (p. 164)

Le mot natura en latin, de même que son équivalent physis en grec, contient essentiellement l’idée de devenir. La nature manifestée est ce qui devient.

René Guénon,  »La grande triade » (extraits)

Chapitre XII. Le Soufre, le Mercure et le Sel

 

Le ternaire alchimique: Soufre, Mercure et Sel.

Le complémentarisme des deux premiers termes et beaucoup plus accentué que celui d’entre l’esprit et l’âme. Le Souffre est envisagé comme principe actif masculin, pendant que le Mercure comme principe passif féminin. Le Sel est en quelque sorte neutre.

Le Souffre, assimilé au principe igné, est le principe d’activité intérieure, irradiant à partir du centre même de l’être. Cette force est identifiée dans l’homme à la puissance de la volonté divine. Le mot grec theion, désignation du Soufre, signifie en même temps «divin».

…tout ce qu’envisage la psychologie est simplement «périphérique» et ne se rapporte en somme qu’à des modifications superficielles de l’être.“ (p. 103)

Le Mercure, à cause de sa passivité, est un principe humide. Parmi ses désignations alchimique est aussi celle de humide radical. Il est considéré comme agissant de l’extérieur en tant que force centripète et compressive. Il s’oppose à l’action centrifuge et expansive du Soufre.

Le Soufre est yang et le Mercure est yin.

De l’action intérieure du Soufre et de l’action extérieure du Mercure se produit une cristallisation. Le produit de cette cristallisation est le Sel. C’est la ‘pierre cubique“ du symbolisme maçonnique. Il existe un rapport évident entre le Soufre et l’esprit et entre le Mercure et l’âme.

On ne peut pas identifier sans réserves le Sel au corps, celui-ci correspond au Sel sous un certain aspect ou dans une application particulière du ternaire alchimique.

Dans une autre application, c’est l’individualité tout entière qui correspond au Sel, dans ce cas le Soufre est le principe de l’être et le Mercure est l’ambiance subtile d’un certain monde ou état d’existence.

Pour reprendre un symbolisme que nous avons déjà employé précédemment, le Soufre est comparable au rayon lumineux et le Mercure à son plan de réflexion, et le Sel est le produit de la rencontre du premier avec le second;…“ (p. 108)

René Guénon,  »La grande triade » (extraits)