Mon oncle d’Amérique (Hommage à Alain Resnais)

Trois destinées, celles d’un journaliste directeur des informations d’un poste de radio, d’un fils d’agriculteur recyclé dans une industrie textile elle-même en mutation, et celle d’une fille d’ouvrier devenue styliste, s’entrecroisent en contrepoint des théories formulées depuis son laboratoire par le professeur Laborit, biologiste et analyste des comportements des rats et des hommes vivant en société.

Jean Le Gall appartient à la bourgeoisie traditionnelle. Il a de l’imagination et de l’ambition et mène une carrière politique et littéraire. Un soir, il rencontre une jeune comédienne, Janine, et, pour elle, quitte femme et enfants. Jeannine Garnier est fille de militants communistes. Elle abandonne brusquement son environnement familial et social contraignant (et pauvre) pour « vivre sa vie ». Sa vie, c’est le théâtre. Sa liaison avec Jean prend fin à la suite d’une démarche de l’épouse de ce dernier, qui utilise le chantage au sentiment. Janine change de métier, d’ambiance, devient conseillère d’un groupe industriel et commercial. C’est à ce titre qu’elle aura à s’occuper du cas de René Ragueneau. René, fils de paysans catholiques, catholique lui-même, a abandonné le travail de la terre pour celui du textile. Il est devenu directeur d’usine . Mais la crise économique et les jeux de l’ambition humaine lui occasionnent une série de déconvenues et humiliations professionnelles. Mal armé pour les affronter, il adopte une attitude farouche et des réactions maladroites qui le conduisent à une tentative de suicide.

Au fur et à mesure que les trois branches de l’histoire se développent, les interventions « hors texte » d’un savant biologiste (Henri Laborit, dans son propre rôle) nous renseignent sur certaines lois du comportement humain fondées sur l’étude du cerveau et de la physiologie animale en général. Ces théories, clairement exposées, soutiennent que les actes qu’accomplit l’individu sont déterminés par le conditionnement de la petite enfance. Chacun réagit selon des pulsions de type primaire : la lutte avec le rival ou la fuite devant l’ennemi, selon le cas. Lorsque le sujet est incapable de choisir entre l’affrontement et la dérobade, il se produit le phénomène d’inhibition qui peut conduire à des réactions-limites comme le suicide.

Film d’Alain Resnais, scénario : Jean Gruault, inspiré par les travaux de Henri Laborit. Avec : Gérard Depardieu (René Ragueneau), Nicole Garcia (Janine Garnier), Roger Pierre (Jean Le Gall), Marie Dubois (Thérèse Ragueneau), Nelly Borgeaud (Arlette Le Gall), Pierre Arditi (Zambeaux), et le professeur Henri Laborit dans son propre rôle.

Selon Laborit, la conduite est réglée par trois motivations : la consommation, la récompense, pour laquelle on fuit ou on lutte, et l’inhibition.

Notre cerveau comporte un cerveau reptilien qui assure nos réflexes de survie et qui dirige notre comportement de consommation. Notre deuxième cerveau, commun avec celui des mammifères, est celui de la mémoire. Il guide notre comportement de récompense : on fuit les expériences que l’on sait douloureuses et on lutte pour rechercher le plaisir. Si toutes les voies sont bouchées, il reste l’inhibition qui conduit à la mort. Notre troisième cerveau, le néocortex, permet d’associer des idées provenant d’expériences différentes. Il ne nous sert bien souvent qu’à tenir un discours qui permet de justifier nos deux premiers comportements.

Il devrait nous permettre de comprendre que ces deux premiers cerveaux n’instaurent entre les hommes que des comportement de domination. Or l’homme n’est fait que de son contact avec les autres hommes. Ne pas être conscient qu’il faut lutter contre les instincts de dominations, ne peut conduire qu’au malheur individuel et collectif.

Amitiés

Claude Sarfati

Souviens-toi Barbara

Barbara 2

A travers son « costume » de la dame en noir, Barbara s’est construit un personnage unique et mystérieux. S’inspirant de ses expériences personnelles et de sa vie pour écrire et composer les chansons qu’elle interprète, la « dame brune » s’est beaucoup contée et confiée dans ses textes. Dans « mon enfance« , « Nantes » et « L’aigle noir », elle raconte respectivement certains épisodes de sa vie : les souvenirs de l’occupation, la mort de son père, l’inceste paternel. Elle a également beaucoup donné à son public a qui elle a livré « sa plus belle histoire d’amour« .

L’apprentissage d’une vie d’artiste

De son vrai nom, Monique Serf, Barbara naît à Paris non loin du Square des Batignoles. Elle est le deuxième enfant d’une famille qui en compte quatre. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, la famille Serf, de confession juive, est contrainte d’errer d’hôtel en hôtel pour fuir l’oppression allemande et se réfugie dans la commune de Saint-Marcelin, en Isère. A la libération, ils s’installent dans une pension du Vesinet, où la future Barbara fait la connaissance de sa voisine, professeur de chant. A son contact, elle apprend le chant, le solfège et le piano et décide de s’inscrire à l’Ecole Supérieure de Musique. Elle y obtient son premier prix de chant et commence à écrire ses premiers textes.

En 1947, elle accède au Conservatoire de Paris où elle étudie entres autres les œuvre de Debussy et Schumann. Dans le même temps, elle est mannequin-choriste dans le spectacle Violettes impériales, joué au théâtre Mogador. Classé Mezzo Soprano, elle quitte rapidement le Conservatoire pour tenter sa chance dans les cabarets parisiens, sans succès. En 1949, elle fait la rencontre des frères Prévert mais les spectacles de « La fontaine des quatre saisons » sont bouclés. Ils lui offrent malgré tout un emploi de plongeuse et Barbara voit défiler la vie artistique de tout Paris (Boris Vian, Mouloudji).

De 1950 à 1952, elle s’exile alors en Belgique. Elle y fait la rencontre d’artistes et de peintres qui vivent dans une belle maison, transformée en ateliers. Ils lui installeront un piano et elle jouera quelques soirs de la semaine devant un public majoritairement étudiant. A la suite de cette aventure, elle ouvre son propre cabaret « Le cheval blanc ».  Elle monte pour la première fois sur scène accompagnée de son piano, vêtue d’un châle noir et maquillée de Kohl. Ainsi commence à se construire le personnage de la « dame en noir ».

La voie du succès

De retour à Paris, elle passe une audition pour le cabaret de « L’écluse« . Sous le nom de scène « La chanteuse de minuit », elle fera les bonheurs du cabaret pendant dix années. Lors de ses tours de chant, elle interprète les chansons de FerréMoustaki, Brassens et teste timidement ses premières compositions « Nantes« , « Chapeau bas » et l’émouvant « Dis, quand reviendras-tu? ». Soixante spectateurs quotidiens viennent l’acclamer chaque jour. Elle dira d’eux qu’ils ont fait sa force et que ce sont eux qui « l’ont mené au Chapiteau de Pantin« . En 1960, elle sort son premier disque chez Odéon, Barbara chante Georges Brassens et est primée pour son interprétation par l’Académie du Disque Français.

Mais c’est sa rencontre avec Louis Hazan, le directeur de Philips, qui va donner un véritable élan à sa carrière. En 1963, sur l’album Barbara chante Barbara, récompensé par le prix de l’académie Charles Cros, elle interprète pour la première fois ses compositions dont « Au bois de Saint Amand » et « Nantes ». C’est le début d’une seconde carrière. Elle fait tout d’abord les premières parties de Georges Brassens et de Serges Gainsbourg avant de s’afficher en lettres lumineuses dans des salles prestigieuses. En septembre 1965, elle est la vedette de Bobino. Bouleversée par l’accueil du public qui lui lance des roses sur scène, elle lui écrit sa plus belle déclaration « Ma plus belle histoire d’amour« , qui paraîtra le 7 novembre 1967 sur l’album éponyme Barbara.

Elle, qui a toujours vécu sans attache, de voyages en voyages, tournent à l’étranger. Elle se produit à Milan, à Bruxelles et au Canada. Le 22 janvier 1968, elle monte sur la scène de l’Olympia pour un récital unique. Le concert est retransmis en direct sur Europe 1. La même année, Georges Moustakicompose pour Barbara « La dame brune »Cette chanson lie les deux artistes qui la chantent, début février 69, sur la scène de l’Olympia, pour un duo qu’ils reproduisent plusieurs soirs. Barbara est alors au sommet de son art. Pourtant, lors de son dernier soir sur cette scène mythique, elle annonce sa décision d’arrêter la scène.

 

Le mal de vivre

Un an plus tard, elle fait son retour avec L’aigle noir, autoportrait intimiste. Ce titre est l’un des tubes de l’été 70 mais le véritable sens de ce texte sera dévoilé bien plus tard. Parallèlement, elle se lance dans l’art dramatique avec un succès confidentiel. Pendant 30 représentations, elle joue le rôle d’une prostituée partie chercher le grand amour en Afrique dans la pièce de théatre Madame et compose la bande son de celle-ci. Elle donne également la réplique à son ami Jacques Brel dans le film Franz, réalisé par le chanteur et obtient un rôle dans L’oiseau rare de Jacques Brialy. Mais le cinéma n’est définitivement pas pour elle. C’est la chanson qui lui offre ses plus belles émotions. Au cours de la décennie, elle enregistre trois nouveaux disques, La fleur d’amour (1971), Amours incestueuses (1972), La louve (1973) et collabore ainsi avec de nouveaux artistes comme William Sheller et Catherine Lara.

C’est au cours de l’année 1973 qu’elle tombe sous le charme d’une maison à Précy en Seine-et-Marne. Barbara se décide enfin à poser ses valises dans un endroit qui lui ressemble. Elle y installe son piano, son rocking chair et peut s’adonner pendant ses insomnies à l’écriture et à la composition. Elle qui n’avait pas connu de jardin, depuis son enfance à Saint-Marcellin, s’inspire de cet endroit pour créer le titre « Précy Jardin » qui figurera en 1981 sur son album Seule. Ce titre résume peut être le mieux l’image de la chanteuse, personnage solitaire que l’on connaît peu. En effet, Derrière la diva insaisissable se cache une femme blessée par l’enfance et tourmentée par ses nuits d’insomnie. En 1974, elle tente de se suicider et est retrouvée inanimée dans sa maison de Précy.

Une femme de passion et de cœur

Après cet épisode, elle, qui avait déclaré ne plus jamais refaire de scène, rompt ce serment et fait sa rentrée au « Théâtre des variétés« . Puis, elle tourne au Japon, au Canada, en Belgique, en Israël, aux Pays-Bas et en Suisse. En 1981, elle fait un triomphe à Pantin. Sous un chapiteau dressé sur l’hippodrome, elle chante pendant plus d’un mois pour 100 000 spectateurs et délivre le dernier jour un nouveau titre « Pantin ». C’est durant ce véritable marathon qu’elle se casse irrémédiablement la voix. Cette fragilité accroîtra l’intensité de ses futures prestations. Elle y rencontre également le comédien Gérard Depardieu. Ensemble, ils se consacrent à la création d’une comédie musicale Lily Passion, œuvre en partie autobiographique. La première a lieu le 21 janvier 1986 au Zénith de Paris. Cette comédie partage la critique et les fans.

Dans les dernières années de son existence, Barbara, qui trouvait l’inspiration dans les différentes étapes de sa vie commence à écrire sur des thèmes qui lui tiennent à cœur. Lors de son spectacle de 1987 au Chatelet, elle est l’une des premières artistes à s’engager contre le SIDA en interprétant la chanson « Sid’amour à mort ». Lorsqu’elle part ensuite en tournée, elle distribue des préservatifs à la fin de ses concerts. Elle visite également régulièrement les malades et ira jusqu’à installer une ligne téléphonique chez elle pour répondre aux personnes en détresse. Barbara était une femme généreuse qui poursuivait son combat contre l’intolérance hors caméra.

En 1990, elle commence une série de concerts au théâtre de Mogador à Paris. Mais ses derniers adieux à la scène se feront trois ans plus tard au Châtelet. Elle retrouve sa voix d’antan mais sa santé fragile l’oblige à écourter les représentations. Son dernier album paraît en 1996 et s’intitule sobrement Barbara 96. Le succès critique et public est unanime mais les problèmes respiratoires de la « dame en noir » la contraignent à se retirer dans sa maison de Précy. Elle se consacre à ses mémoires qui resteront inachevées et à des engagements qui lui tiennent à cœur. Elle donne les droit à vie de sa chanson « Le couloir » à l’association Act Up et se rend régulièrement dans les prisons soutenir les détenus. Le 24 novembre 1997, elle est hospitalisée et décède le lendemain d’une pneumonie.

Source: Encyclopédie L’internaute.

Barbara est aussi l’auteur d’un livre: Il était un piano noir…

Présentation de l’éditeur

Plus jamais je ne rentrerai en scène.Je ne chanterai jamais plus…Sur cet aveu de désespoir de celle qui disait à son public « Ma plus belle histoire d’amour, c’est vous » s’ouvrent ces Mémoires, que la mort – survenue en novembre 1997 – ne lui laissa pas le temps d’achever.Nous y rencontrons la petite fille des Batignolles, qu’une enfance vagabonde, sur fond d’Occupation, amènera notamment à Marseille, à Tarbes, à Saint-Marcellin, avant le retour à Paris. Puis la jeune fille qui, bravant la misère et les déceptions, poursuivra obstinément son rêve : chanter, devant un piano noir, jusqu’aux débuts à L’écluse, aux premiers succès, aux tournées…Témoignage sensible et vrai sur un métier, la chanson, ce livre est aussi et avant tout l’autoportrait d’une femme rebelle, artiste, solitaire malgré l’adulation de ses fans, et qui aura retenu jusqu’au bout quelques aveux déchirants, livrés dans ces pages.
Voilà un article que j’ai voulu le plus complet possible sur une artiste qui m’a accompagné aux quatre coins du monde, aux quatre coins de ma vie.
Amitiés, bonne lecture, bonne écoute: Claude Sarfati