En écoutant le sage Hindou Krishnamurti

Spirituel… Pour une oreille un peu sensible, échaudée par toutes les sottises auxquelles il a été associé, ce mot est presque obscène. Et pourtant, dans certains contextes, quel autre mot peut-on employer? Quand on lit Maître Eckhart, par exemple, ou quand on écoute, comme nous l’avons fait à Gstaad, Krihsnamurti (1), on est contraint de reconnaître que « spirituel » est parfois un mot juste. « Je vous montre la douleur et la fin de la douleur. »

Tous les grands maître de la vie spirituelle (hé oui!) ont été à la fois profondément pessimistes et presque infiniment optimistes. Si certaines conditions sont remplies, les humains peuvent cesser de se conduire comme les misérables créatures qu’ils s’imaginent être, à tort, et devenir ce qu’ils ont toujours été, s’ils se donnent une faible chance de l’apprendre: libérés, illuminés, « divins en Dieu ». Mais que seule une minuscule minorité d’entre nous y parviendra est une évidence écrasante. Beaucoup sont appelés, peu sont élus. Car peu choisissent d’être choisis.

La fin de la douleur est possible; mais la permanence de la douleur est certaine. Tout ce que peuvent faire les maîtres de la vie spirituelle est de nous rappeler ce que nous sommes, et ce que nous pouvons faire pour atteindre la reconnaissance de notre nature: méditer, au sens d’une conscience complète et inclusive de chaque instant, pour bénéficier des corollaires de cette haute méditation, le bien-être et le bien-agir.

(1) Mystique et philosophe, propagandiste en Occident de l’enseignement védantique, comme le fut, voici un demi-siècle Vivekananda, célébré par Romain Rolland. Consulter, parmi les dernières publications: « la nature de l’homme selon le Vedanta« , de John Levy (éd. Denoël). – Les conférences de Krishnamurti vont être publiées en français bientôt.

Quelle formidable machine que l’homme!

Article d’Aldous Huxley

Revue Planète 1962.

 

Jiddu Krishnamurti, né à Madanapalle le 11 mai 1895 et décédé à Ojai, le 17 février 1986 il y a 27 ans ce dimanche.

Rendons lui hommage dans une « vraie » Méditation sur ce: qui suis-je?

Amitiés: Claude Sarfati

 

La pensée a sa place (Krishnamurti)

 Swami Jiddu Krishnamurti-photos

Nous utilisons le mot « raison » non pas dans un sens philosophique avec toutes ses implications ; nous donnons à ce mot le simple sens d’une grande honnêteté dans la pensée, d’un équilibre mental sain, le sens d’un « insight » clair, d’une perception où il n’y a pas de tromperie ou d’auto-illusion. Sans la raison au départ, vous ne pouvez pas aller très loin. Parce ce que sans la raison vous êtes inévitablement conduits vers toutes les formes d’illusions, d’idées fausses, de peurs et tout le reste. Pour comprendre la nature et le sens de la méditation, il est absolument nécessaire de raisonner pas à pas, afin que votre esprit soit affûté, que votre cerveau soit clair, sans la moindre distorsion, sans la moindre pression. Cela ne demande aucune croyance, aucun système ; mais cela nécessite un cerveau qui soit sensible, affûté, clair, qui puisse procéder pas à pas, non de manière illogique, non en sautant des étapes, mais avec rationalité, avec équilibre.

J. Krishnamurti, 26 février 1964, Bombay

L’espace est nécessaire et l’espace ne peut se produire naturellement que lorsque vous utilisez l’esprit de façon logique, rationnelle, saine, et que vous voyez les limites de la raison. Après tout, la rationalité veut dire la capacité de penser objectivement, non de façon personnelle, non pour un profit personnel, non selon un certain modèle de croyance, d’idées ou de conclusions, mais penser avec clarté, objectivité, sainement, ce qui veut dire avec santé et force, une telle capacité donne beaucoup de sécurité, non seulement extérieurement mais intérieurement. Puis vous n’avez plus rien dont vous puissiez avoir peur, vous pouvez penser logiquement. Et quand nous sommes… quand nous pénétrons dans cette question de la méditation, qui est très complexe, qui nécessite une grande sensibilité pour comprendre, comprendre c’est-à-dire pouvoir avoir un « insight », l’esprit doit être libre et avoir de l’espace pour observer et ne pas être envahi. Est-ce juste ?

Madras, 26 décembre 1973.

Bonne lecture, Claude Sarfati

un dialogue avec soi-même (fin)

Ainsi, par la négation de ce qui n’est pas amour,

l’amour est.

Je n’ai pas besoin de lui courir après.

Si je le poursuis, ce n’est pas l’amour,

c’est une récompense.

Alors, dans cette enquête, par la négation, j’ai mis fin,

lentement, attentivement, sans déformation, sans illusion,

à tout ce qui n’est pas

___ L’autre est.

__J.Krishnamurti__ (extrait d’une discussion qui eut lieu lors du Brockwood Park Gathering, le 30 août 1977)

un dialogue avec soi-même (8)

… Ainsi, dans ma conversation avec moi-même, j’ai découvert que le sentiment de solitude est créé par la pensée.

La pensée s’est maintenant rendue compte par elle-même qu’elle est limitée et qu’elle ne peut donc pas résoudre le problème de la solitude.

Puisqu’il en est ainsi, le sentiment de solitude existe-t-il?

La pensée a crée ce sentiment de solitude, de vide, parce qu’elle est limitée, fragmentaire, divisée; or, quand elle prend conscience de cela, le sentiment de solitude n’est pas et, partant, il y a libération de l’attachement.

Je n’ai rien fait; j’ai observé mon attachement, ce qu’il suppose, la rapacité, la peur, l’impression de solitude et tout cela; et, en le suivant à la trace, en l’observant, non pas en l’analysant, mais simplement en regardant et regardant, le fait que c’est la pensée qui a fait tout cela apparaît.

La pensée, étant fragmentaire, a créé cet attachement.

Lorsqu’elle s’en rend compte, l’attachement cesse.

Il n’y a pas d’effort du tout.

Car sitôt qu’il y a effort

le conflit réapparaît.

Dans l’amour il n’y a aucun attachement; s’il y a attachement, l’amour n’est pas.

Or le facteur principal a été suprimé par la négation de ce que l’amour n’est pas, par la négation de l’attachement.

Dans ma vie quotidienne cela veut dire qu’il n’y a aucun souvenir de quoique ce soit que ma femme, ma compagne ou ma voisine ait fait pour me blesser, aucun attachement à une image que la pensée a créée d’elle.

Comment elle m’a malmené, comment elle m’a réconforté, comment je lui dois un plaisir sexuel, toutes les différentes choses au sujet desquelles le mouvement de la pensée a créé des images;

l’attachement à ces images a disparu.

Il y a encore d’autres facteurs.

Dois-je les explorer tous, pas à pas, l’un aprés l’autre?

Ou est-ce que tout est terminé?

Dois-je investiguer

comme je l’ai fait pour l’attachement

vivre et explorer la crainte, le plaisir, le désir de réconfort?

Je vois que je n’ai pas besoin de reprendre, étape par étape, une enquête sur tous ces divers facteurs.

Je le perçois d’un seul coup d’oeil; j’ai saisi.

J.Krishnamurti (extrait d’une discussion qui eut lieu lors du Brockood Park Gathering, le 30 août 1977)

un dialogue avec soi-même (7)

… Donc, la pensée se rend-elle compte par elle-même qu’elle est limitée?

Il me faut le découvrir.

C’est un défi auquel je dois faire face.

A cause de ce défi, j’ai une gigantesque énergie.

Présentons la chose différement.

La conscience se rend-elle compte que son contenu est elle-même?

Ou serait-ce que j’ai entendu quelqu’un d’autre déclarer:

La conscience est son contenu; c’est son contenu qui la constitue.

à quoi j’aurai répondu oui, c’est bien ça?

Voyez-vous la différence entre les deux.

La deuxième façon de voir, issue de la pensée, est imposée par le moi.

Si j’impose quelque chose à la pensée, il y a conflit.

C’est comme quand un gouvernement dictatorial impose sa loi par voie d’ukase, à la différence qu’ici, ce gouvernement, c’est ce que j’ai créé.

Ainsi, je me demande:

est-ce que la pensée s’est rendue compte de ses propres limitations?

Ou est-ce qu’elle prétend être quelque-chose d’extraordinaire, de noble, de divin?

Ce qui serait absurde, étant donné qu’elle est issue de la mémoire.

Je vois qu’il faut que ce point soit établi avec une limpidité absolue;

qu’il faut qu’à l’évidence aucune influence extérieure n’ait imposée à la pensée la notion qu’elle est limitée.

Alors parce que rien n’à été imposé, il n’y a pas de conflit;

la pensée saisit, tout simplement, qu’elle est limitée;

elle sait que tout ce qu’elle fait

qu’il sagisse d’adorer dieu et ainsi de suite

est limité, mièvre, mesquin

même si elle a parsemé l’europe de merveilleuses cathédrales destinées au culte de dieu.

J.Krisnamurti (extrait d’une discussion qui eut lieu lors du Brockood Park Gathering, le 30 août 1977)